Dr. Arron TCHOUKA SINGHE

Dr. Arron TCHOUKA SINGHE | Chief Oil Sector Officer | African Development Bank

In your view how can stakeholders ensure the issue of energy transition and Paris agreement is aligned for the benefit of African countries?

Ensuring a just transition will require putting people at the center of the transition process. It is necessary for the stakeholders to take into consideration the development needs of RMCs letting RMCs write their own story on transition in line with their needs for energy access, affordability, and energy security as well as their resource endowments; geopolitical influence; and the wider benefits to their economies through local content, value chain domestication and intersectoral linkages.
As I often emphasize in other fora, although the word transition describes the global pathways to netzero carbon emissions, it may misrepresent such pathways for African countries, since most of them are already in a situation of near netzero, netzero, or even netnegative. In addition, most African countries fall under least developed countries’ category, and their populations linger in abject and multidimensional poverty, including energy poverty notwithstanding their huge natural resources’ endowments. As such, a better representation of African countries’ situation is low carbon development, which highlights their needs for development and poverty eradication in an environmentally responsible manner.

This takes us to the main criteria of wellperforming energy systems and the strategies to ensure such by each country. A wellperforming energy system must obey the criteria of security, access, affordability, and environmental sustainability. Security is ensured by domestic resources and costeffective imports strategies. The right policies and adequate investments are essential for energy access, affordability, and environmental sustainability.

Energy security is gradually shifting from solely hydrocarbons supply security to consider critical minerals and renewable energy resources. On the pathways to global transition, shocks like the COVID19 pandemic and the RussianUkraine crisis are reemphasizing the tradeoff that countries make amongst security, accessibility, affordability, and environmental sustainability to ensure good performance and stability of their energy systems. During the pandemic, logistical challenges favored rapid development and acceptance of renewables while the RussiaUkraine crisis is favoring security, accessibility, and affordability at the expense of environmental sustainability. Other regions are reopening coal power plants and are committing to scale up investments in new gas developments in Africa to establish sustainable alternatives to Russia supplies, for instance. The crisis is also strengthening the influence of Africa on the global energy scene as
Europe and other regions see in Africa a trusted partner for their energy independence from Russia and a key player for balancing the global energy market.

As the RussiaUkraine crisis revives the debate on energy security and influences the tradeoff amongst energy types for ensuring wellperforming energy systems, it puts to test the key determinants of energy policies and geopolitics and expands the space within which geopolitical influences and equilibria are moving. It reinforces the position of those who advocate for enough incentives to encourage a country rich in natural gas for instance, to forego its exploitation and rely only on renewables, whereas naturebased solutions, carbon capture storage and use (CCSU) as well as bioenergy with carbon capture and storage (BECCS) can help ensuring neutrality or negativity in the process. This holds also for other resources including coal and oil.

Given the foregoing, it will take a global effort from all key stakeholders and firm commitments starting with governments, regional and global development finance institutions (DFI) and multilateral and bilateral development organizations (MDOBDO), private sector and investors, as well as the African diaspora to ensure that global energy transition and Paris Agreements align with African countries’ development goals and aspirations. Governments in African countries must provide the right policies and right environment for domestic and foreign investments to flow in; human capital to be developed; technology to be developed, acquired, and domesticated; and appropriate strategies to be put in place to use resources first for their domestic and regional development, materialized through value chain domestication and regionalization with investment in crossborder infrastructure and value chains. DFI, MDOBDO and others must commit to support governments’ policies and strategies and their alignment with international policies and directives. This comes with important challenges since value chain domestication strategies as well as technology and human capital development policies in African countries may compete with other countries’ natural resources supply security and technology commercialization objectives.
In short, stakeholders should ensure that global transition translates into sustainable development of African countries. Transition should not be or represent only changing from fossil primary energies to renewable primary energies, but it should be accompanied by intended and thorough structural transformation that enhances domestic resources mobilization, local financial systems, and stronger local participation. We should avoid embarking on other pathways to natural resources curse.

This text represents the opinion of the author and does not reflect the views of any Development Finance Institution.

Dr. Arron TCHOUKA SINGHE

Dr. Arron TCHOUKA SINGHE | Chef du Secteur Pétrolier | Banque Africaine de Développement

Selon vous, comment les parties concernées peuvent-elles s’assurer que la transition énergétique et l’Accord de Paris jouent en faveur des pays africains ? 

L’humain doit être au centre de la transition pour en garantir son équité. Les parties concernées doivent tenir compte du besoin de développement des PMR en les laissant définir leur scénario de transition en accord avec les besoins énergétiques (accès concret et économique, sécurité) ainsi qu’en matière d’allocation des ressources, de puissance géopolitique et de bénéfices économiques au sens plus large du terme (contenu local, réappropriation de la chaîne de valeur et liens intersectoriels).

Comme je le souligne souvent par ailleurs, bien que le mot « transition » décrive la voie à suivre pour le monde vers un objectif zéro carbone, cette voie peut ne pas correspondre aux pays africains qui sont pour la plupart déjà dans une situation de zéro carbone ou presque ou qui peuvent même présenter un bilan carbone négatif. En outre, la plupart des pays africains figurent parmi les pays les moins avancés et leur population reste en proie à une pauvreté abjecte et multidimensionnelle, notamment sur le plan énergétique et ce malgré leurs énormes ressources naturelles. Ainsi, la situation qui représente plus justement les pays africains est celle de « développement peu générateur de carbone » qui souligne le besoin de développement et d’éradication de la pauvreté dans le respect de l’environnement.

Cela nous amène aux principaux critères définissant un système énergétique performant et aux stratégies pour que ce soit le cas dans chaque pays. Un système énergétique performant doit répondre aux critères de sécurité, d’accès concret et économique et de viabilité environnementale. La sécurité repose sur la stratégie en matière de ressources nationales et d’importations économiquement viables. L’accès concret et économique et la viabilité environnementale reposent sur des politiques appropriées et des investissements adéquats.

La sécurité énergétique passe progressivement de la seule sécurité de l’approvisionnement en hydrocarbures à la prise en compte des ressources énergétiques renouvelables et des minéraux essentiels. Au cours de cette transition mondiale, des chocs tels que la pandémie de COVID-19 ou la crise russo-ukrainienne montrent une nouvelle fois le compromis fait par les pays entre sécurité, accessibilité concrète et économique et viabilité environnementale pour garantir un système énergétique stable et performant. Les défis logistiques posés par la pandémie ont accéléré le développement et l’acceptation des énergies renouvelables tandis que la crise russo-ukrainienne conduit à privilégier la sécurité et l’accessibilité concrète et économique au détriment de la viabilité environnementale. A titre d’exemple, d’autres pays rouvrent des centrales au charbon et s’engagent à accroître les investissements dans les nouveaux développements gaziers en Afrique afin de sécuriser une alternative durable aux approvisionnements russes. La crise renforce également le poids de l’Afrique sur la scène énergétique mondiale car l’Europe et d’autres régions voient en l’Afrique un partenaire de confiance pour leur indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie et un acteur clé pour équilibrer le marché mondial de l’énergie.

En relançant le débat sur la sécurité énergétique et les choix d’un mix énergétique garant d’un système énergétique performant, la crise russo-ukrainienne met à l’épreuve les paramètres qui sous-tendent les politiques énergétiques et la géopolitique et élargit le champ géographique au sein duquel se jouent l’influence et l’équilibre géopolitique. Cela renforce la position de ceux qui plaident pour des incitations suffisantes afin d’encourager, par exemple, un pays riche en gaz naturel à renoncer à son exploitation et à ne compter que sur les énergies renouvelables, alors que les solutions qui s’appuient sur la nature, le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (CCSU) ainsi que la bioénergie avec captage et stockage de dioxine de carbone (BECSC) peuvent aider à assurer la neutralité ou la négativité du bilan carbone. Cela vaut également pour d’autres ressources, y compris le charbon et le pétrole.

 

Au vu de ces éléments, veiller à ce que la transition énergétique mondiale et l’Accord de Paris soient en accord avec les objectifs et les aspirations au développement des pays africains passe par un effort et un engagement ferme, au niveau mondial, de tous les grands acteurs, à commencer par les gouvernements, les institutions régionales et mondiales de financement du développement (IFD) et les organisations multilatérales et bilatérales de développement, le secteur privé et les investisseurs, ainsi que la diaspora africaine. Les gouvernements des pays africains doivent mettre en place des politiques et un environnement propices aux investissements nationaux et étrangers. Le capital humain doit être renforcé. Il faut développer la technologie,  l’acquérir et se l’approprier. Les bonnes stratégies doivent être mises en place pour utiliser, en premier lieu, les ressources au service du développement national et régional via la réappropriation et la régionalisation de la chaîne de valeur et des investissements dans des infrastructures et une chaîne de valeur transfrontalières.

Les institutions de financement du développement et les organisations multilatérales et bilatérales, ainsi que les autres acteurs, doivent s’engager à soutenir les politiques et les stratégies des gouvernements et leur alignement sur les politiques et les directives internationales. Cela s’accompagne de défis importants car les stratégies de réappropriation de la chaîne de valeur ainsi que les politiques de développement de la technologie et du capital humain dans les pays africains peuvent entrer en concurrence avec les objectifs de sécurité de l’approvisionnement en ressources naturelles et de commercialisation de la technologie d’autres pays.

En bref, les parties concernées devraient veiller à ce que la transition mondiale se traduise par un développement durable des pays africains. La transition ne devrait pas être ou représenter seulement le passage des énergies primaires fossiles aux énergies primaires renouvelables, mais elle devrait s’accompagner d’une transformation structurelle intentionnelle et approfondie qui renforce la mobilisation des ressources nationales, les systèmes financiers locaux et une participation locale plus forte. Nous devrions éviter de nous engager sur d’autres voies menant à la malédiction des ressources naturelles.

Ce texte représente l’opinion de l’auteur et ne reflète pas le point de vue d’une institution de financement du développement.